Monday, January 25, 2010

Journal de Jimmy Jones, jour 2

— T'es  nouveau toi ici, non?

Sa familiarité m'énerve, mais étant le petit nouveau, je n'en fais pas un plat. On s'intéresse à moi, c'est déjà pas mal.

C'est ainsi que j'ai rencontré la secrétaire obèse et malodorante en ce deuxième matin au coeur de la C3I. Nerveux, j'arbore un sourire timide qui signifie oui; mais il veut également dire en espérant qu'elle ne me colle pas au cul.

— En passant, moi c'est Jacinthe.
— Jones. Jimmy Jones.
— Bienvenue chez nous Jimmy.
— Merci.
— As-tu tout ce qu'il te faut? Stylo, portable, netbook? Tu me le dis s'il te manque quelque chose, OK?

Finalement, Jacinthe est aux petits soins. Ferait pas de mal à une mouche.

Mon bureau est au 7e étage. Cordé en rangée parfaite de trois cubicules et faisant face à autant d'espaces de travail, ergonomiquement ajusté, mon cubicule est le premier de la rangée, adjacent à la machine à café, l'imprimante et le mini-frigo de l'étage.

Moderne, le corridor dispose d'un énorme sofa pouvant accueillir au moins cinq personnes de taille moyenne. Cinq personnes normalement constituées ou trois Jacinthe. Une console Wii est mise à la disposition des employés qui y jouent quand bon leur semble.

Même le patron, Charlie Wang, vient y faire son tour et joue une excellente partie de Wii Sports, surtout le golf. C'est du moins ce que m'a raconté Jacinthe lorsque je suis allé luncher avec elle et les collègues, hier, au Ruth's Chris Steak House.

Au-dessus du sofa géant trône une peinture tout aussi gigantesque et étrange, une inquiétante toile d'un certain Lucien Schott, germanique ou peut-être celte d'origine, c'est du moins ce que révèle l'inscription à la droite de la toile. Naissance en 1941. Lieu de résidence inconnu.

La toile représente une femme (ou un homme?), vu de dos des pieds aux épaules, allongé sur un tapis angora; son corps traverse la toile par la diagonale sud-ouest nord-est, le galbe de ces fesses ne permet pas de déterminer l'âge du modèle.

Que cette peinture ait été affichée dans le bureau de mon patron, soit, les goûts en art se discutent jusqu'à un certain point. Mais voir cette peinture chaque fois que je soulève mon train de mon siège a de quoi inquiéter. Sans parler des sourires que l'on me jette lorsqu'on aperçoit mon malaise.

Et dire que c'est la meilleure boîte, paraît-il, pour mettre en pratique mes talents.

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